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Que faire en cas d’opposition injustifiée d’un chèque par un débiteur ?

Date de publication 07-03-2024
Auteur Mathilde Personnic

En émettant un chèque, le débiteur transmet au bénéficiaire la propriété de la provision. En raison du principe de l'irrévocabilité de la provision, l'opposition au paiement d'un chèque est en principe interdite sauf cas limitativement énumérés par la loi.

L’article L.131-35 du Code monétaire et financier dispose que :

« Le tiré doit payer même après l'expiration du délai de présentation. Il doit aussi payer même si le chèque a été émis en violation de l'injonction prévue à l'article L. 131-73 ou de l'interdiction prévue au deuxième alinéa de l'article L. 163-6.

Il n'est admis d'opposition au paiement par chèque qu'en cas de perte, de vol ou d'utilisation frauduleuse du chèque, de procédure de sauvegarde, de redressement ou de liquidation judiciaires du porteur. Le tireur doit immédiatement confirmer son opposition par écrit, quel que soit le support de cet écrit.

Tout banquier doit informer par écrit les titulaires de compte des sanctions encourues en cas d'opposition fondée sur une autre cause que celles prévues au présent article.

Si, malgré cette défense, le tireur fait une opposition pour d'autres causes, le juge des référés, même dans le cas où une instance au principal est engagée, doit, sur la demande du porteur, ordonner la mainlevée de l'opposition. »

Quatre précisions :

  • L’opposition n'est admise par notre droit que pour des motifs précis, en l'occurrence « qu'en cas de perte, de vol ou d'utilisation frauduleuse du chèque, de procédure de sauvegarde, de redressement ou de liquidation judiciaires du porteur ». Aucun autre motif ne saurait la justifier, de sorte que le Juge prononcera une telle mainlevée, chaque fois que le motif de l'opposition n'est pas l'un des motifs légaux admissibles.
  • La Cour de cassation a eu l’occasion de rappeler par un arrêt de la Chambre commerciale économique et financière du 5 Décembre que ce texte attribue une compétence en la matière qu'au seul juge des référés. Il n'est donc pas question de reconnaître un pouvoir concurrent, à l'égard de la procédure de mainlevée, à une autre juridiction.
  • L'action en mainlevée demeure encadrée par un délai. La loi étant taisante sur ce point, la jurisprudence est venue préciser que le bénéficiaire d'un chèque ne pouvait agir en mainlevée de l'opposition que jusqu'à la prescription de l'action contre le tiré, c'est-à-dire dans le délai d'un an prévu par l'article L. 131- 59, alinéa 2 du Code monétaire et financier.
  • L'opposition illicite par une personne physique constitue un délit puni de 5 ans d'emprisonnement et 375.000 € d'amende, ainsi que la peine complémentaire d'interdiction d'émettre des chèques pour une durée de 1 à 5 ans. Lorsque le délit est commis par une personne morale, celle-ci encoure une peine d'amende de 1.875 000 €.

Mathilde PERSONNIC