Le 18 septembre 2024 , la chambre commerciale de la Cour de cassation a jugé que le seul fait de garder le silence sur la situation financière d’une société lors d’une cession d’actions constitue une dissimulation intentionnelle au sens de l’article 1137 du Code civil (et ce même si l’autre partie ne cherche pas à se renseigner), ce qui justifie l’annulation de la cession.
L’acquéreur de la totalité des actions d’une SAS a assigné le cédant, seul associé et dirigeant de la société cédée, en annulation de la cession en sollicitant la restitution de la somme correspondant au prix de vente. Il invoquait la dissimulation de certaines informations financières et notamment d’un redressement fiscal.
La cour d’appel de Douai, dans un jugement du 15 septembre 2022 (n° 21/00672) a rejeté cette demande, considérant qu’il n'était « pas démontré que ce passif aurait été porté à la connaissance de l’acheteur mais [qu’]il pesait sur celui-ci, alors qu'il prenait le contrôle de la société et compte tenu de son expérience dans la gestion de sociétés pour avoir été antérieurement gérant d'une société […], une obligation renforcée de se renseigner sur la situation de la société » qu'il acquérait. Selon la Cour, en l’« en l'absence de toute démarche du cessionnaire pour se renseigner sur la situation financière de la société cédée, le silence du cédant sur l'existence des dettes ou des contrats liant la société avec des tiers ne constitu[ait] pas une dissimulation volontaire de la situation financière de l’entreprise pouvant caractériser un dol ».
Selon l'article 1137 du Code civil, constitue un dol la dissimulation intentionnelle par l'un des cocontractants d'une information dont il sait le caractère déterminant pour l'autre partie. En rejetant la demande en annulation de la cession de parts sociales « par des motifs tirés de ce que le cessionnaire aurait dû se renseigner, avant la cession, sur la situation financière de la société, impropres à exclure l'existence d'une réticence dolosive, laquelle rend toujours excusable l'erreur provoquée, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision ».
En conclusion, il résulte de cette décision que le cocontractant qui détient information de nature à potentiellement dissuader l’autre partie de contracter doit la lui révéler spontanément, même si l’autre partie ne cherche pas à se renseigner, sans quoi il s’exposerait à une action en annulation du contrat pour dol.
Sources :
Cass. com., 18 sept. 2024, n° 23-10.183, F-B
CA Douai, 15 sept . 2022, n° 21/00672
Article 1.737 du Code civil